Ne craignez pas !
« Ne craignez pas ! ». Trois petits mots, pas un de plus. Ils auraient presque suffi. Ils ont été prononcés par un prêtre de la cathédrale du Puy-en-Velay, lors de la messe de lancement du pèlerinage, direction Compostelle, en juillet dernier. Aussi surprenant que cela puisse paraître, ces trois mots m’ont suivi durant plusieurs jours de marche.
Mais au fait pourquoi ce prêtre nous demandait-il de ne pas craindre ? De quelle crainte parlait-il exactement ? Ne pas avoir peur de la bête du Gévaudan qui hante les forêts et les plateaux de Haute-Loire ? Certainement pas. En réalité le message était à la fois simple et multiple.
Cette homélie nous appelait notamment à ne pas craindre les rencontres avec les pèlerins croisés en chemin, quelles que soient leurs différences et leurs motivations. Chacune d’elles se révèle source d’échanges, d’enrichissement, d’ouverture, d’acceptation de l’altérité. Car l’autre est aussi celui qui peut aider, soutenir. Si sur ces chemins escarpés l’on se trouve face à soi-même, face à ses forces et ses faiblesses, on n’est jamais tout à fait seul si surviennent quelques difficultés. Tel est le concept de ce pèlerinage.
Évidemment, alors que se profilent les pentes rocheuses et les chemins racineux, il s’agit de ne pas craindre l’engagement physique, l’effort continue. Notre société de confort ne nous y prépare pas. Il convient d’aller au bout de son chemin, sans renoncer lorsque se présentent des obstacles. Et lorsqu’apparaissent au loin les toits de l’hébergement du soir, ne pas se convaincre qu’on est déjà arrivé… Un comportement à tenir sur les chemins de l’Aubrac mais facilement transposable dans notre vie quotidienne, alors que les tentations aux renoncements et à la facilité sont fréquentes.
Ne pas craindre enfin d’affirmer sa foi et sa quête spirituelle. Elles éclairent par leurs réponses les questions les plus diverses qui envahissent et parfois obscurcissent notre vie.
« Ne craignez pas ! ». Cela fait évidemment écho au « N’ayez pas peur » lancé comme un étendard par le pape Jean-Paul II en 1978. Écho aussi au « Soyez sans crainte » martelé par le pape François lors des JMJ à Lisbonne, le souverain pontife demandant aux jeunes de ne jamais se décourager, mais de lutter pour la justice et pour la paix.
Alors, pour répondre à ces appels, signes de foi et de courage, chacun de nous peut organiser à sa manière sa vie de pèlerin. Avec ou sans sac à dos, et avec le risque — ou la chance — d’en revenir changé.
Jean-François Laville