La Messe chrismale a été célébrée par monseigneur Alexandre Joly, mardi 12 avril, en l’église Saint-Loup à Auxon.
« Le Seigneur m’a envoyé consoler tous ceux qui sont en deuil, ceux qui sont en deuil dans Sion, mettre le diadème sur leur tête au lieu de la cendre » (cf. Is 61, 1-3). Nous avons commencé le carême en recevant de la cendre sur notre tête et voilà que, à l’entrée du Triduum Pascal, le Seigneur vient mettre sur notre tête un diadème pour remplacer la cendre. Le Seigneur est un Dieu de consolation, il vient supprimer le deuil, il vient apporter l’habit de fête pour chasser l’esprit abattu.
Alors que nous allons suivre le Seigneur sur le chemin de sa Passion et de sa Résurrection, nous faisons mémoire dans le cœur de ceux qui sont en deuil, de ceux qui avancent l’esprit abattu. Disciples du Christ, appartenant à l’Église qui est le corps du Christ, nous confions au Seigneur les peuples qui souffrent, les victimes de la violence, du terrorisme, les femmes et les hommes qui subissent les assauts de la haine et de la destruction. Nous demandons au Seigneur qu’il change les cœurs et apporte la consolation.
L’Église est le peuple de l’onction, la communauté de ceux qui ont été marqués par l’huile sainte et qui, au nom du Seigneur, transmettent la consolation qui vient du Seigneur, la joie de Dieu qui est plus forte que toute tristesse. Elle n’est pas une association de femmes et d’hommes qui auraient les mêmes intérêts, quels qu’ils soient, ni politiques, ni économiques, ni même religieux. L’Église n’est pas le rassemblement des purs et des parfaits. L’Église est l’Épouse que Dieu a choisie et qu’il aime, qu’il marque de l’huile d’allégresse et de l’huile du salut. Dieu nous rassemble en son Église pour que nous puissions apporter au monde sa joie et sa consolation.
En cette messe solennelle où je vais consacrer le saint chrême et bénir l’huile des malades et l’huile des catéchumènes, il est bon de nous rappeler que nous avons reçu l’onction au jour de notre baptême. Ce jour-là, le Seigneur a accompli son projet mûri depuis les commencements de l’Alliance : « Vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte » (Ex 19, 6). Dieu a fait alliance avec son peuple dans ce seul but, faire de nous un royaume de prêtres, une nation sainte.
Notre sainteté n’est pas la qualification d’une prétendue perfection : la sainteté est la marque de Dieu. L’huile est le signe et l’instrument utilisés par Dieu pour communiquer sa sainteté. Le Saint-Esprit lui-même vient nous marquer pour que nous soyons « une demeure spirituelle et un sacerdoce saint ». Lorsque Josué s’inquiète que certains prophétisent dans le peuple, Moïse soupire : « Ah, si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux ! » (Nb 11, 29). Le rêve de Moïse s’accomplit en Jésus : recevant l’onction, entrant dans sa Passion et dans l’offrande de sa vie, devenant le Grand Prêtre sur l’autel de la Croix, le Christ Seigneur fait de son peuple nouveau « un royaume, des prêtres pour son Dieu et Père » (Lumen Gentium 10 ; cf. Ap 1, 6 ; 5, 9-10).
Chers amis, chers frères et sœurs, le Christ fait de nous un peuple de prêtres, afin que nous puissions faire à notre tour l’offrande de notre vie, que nous puissions « proclamer les merveilles de celui qui, des ténèbres, les a appelés à son admirable lumière » (cf. 1P 2, 4-10). Quel honneur et quelle responsabilité ! Cette onction nous conduit à apporter « l’huile de joie au lieu du deuil » (Is 61, 3).
En cet événement de l’Église universelle voulu par le pape François, le synode des évêques et sa préparation à travers la grande consultation de chaque Église locale, le Seigneur nous invite à prendre conscience de ce grand don qu’il fait à chaque baptisé : membre de son corps, marqué par le mystère pascal de la mort et de la résurrection, il communie au mystère même de Dieu et participe à la vie de l’Église pour sa mission. Chacun d’entre nous est marqué par l’onction pour participer à la vie et à la mission de l’Église. Chacun à sa place, selon sa fonction, mais chacun réellement. Le Pape François a suscité un processus qui implique toute l’Église universelle parce qu’il y a un vrai défi aujourd’hui, dans notre Église, à une prise de conscience renouvelée de la place de chacun, de la fécondité de chacun, de la participation de chacun, afin que l’Église puisse accomplir la mission qu’elle a reçue du Christ.
Cette mission concerne l’humanité tout entière, une mission de consolation, une mission de salut, une mission d’espérance, une mission de joie. Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-mêmes mais bien pour le bien de l’humanité tout entière, pour que Dieu puisse nous rassembler dans son amour, pour que Dieu puisse toucher le cœur de chacun et y déposer sa joie.
Afin que l’ensemble du peuple de Dieu, peuple de prêtres, peuple de saints, puisse accomplir la mission lui confie, le Christ a institué le ministère ordonné, les diacres, les prêtres et les évêques, qui sont ordonnés pour servir l’ensemble du peuple de Dieu. Nous rendons grâce aujourd’hui pour les prêtres que Dieu a donnés à notre Église, nous demandons au Seigneur de susciter le désir d’être prêtre dans le cœur de nombreux jeunes aujourd’hui, afin que le peuple tout entier soit consacré, afin que le peuple tout entier puisse participer à l’offrande du Christ que le prêtre réalise sur l’autel.
Quelle belle Église où Dieu appelle certains à un ministère spécifique pour que l’ensemble du peuple puisse être un peuple sacerdotal ! Quelle belle Église où Dieu suscite le don de quelques-uns dans le service de l’Église pour que l’ensemble des baptisés puisse faire de sa vie une offrande dans l’offrande du Fils unique ! Quelle belle Église, Épouse du Christ, qui est associée au mystère pascal pour apporter l’huile de la consolation, l’huile de la force, l’huile du réconfort, l’huile de la guérison, l’huile de la joie, l’huile du salut !
Que le Seigneur fasse progresser encore son Église afin que, purifiée par le bain d’eau et habitée par son Esprit, elle puisse laisser apparaître la bonne odeur du Christ et apporte la joie véritable. Amen !
+ Alexandre Joly
Évêque de Troyes